Marcher pour aller nulle part, pour avoir son corps en mobilité alors que son esprit est immobile. Aller quelque part. Voyager, avancer pour s’éviter, pour ne pas se retrouver face à sa solitude. Des heures durant. À écouter Jeanne Moreau chanter India Song.
Avoir un but pour ne pas se perdre.
Se soustraire au regard des autres. Être immobile, s’enfuir, se perdre encore.
Au milieu de la foule, être par en-dedans.
Des heures à marcher, des heures à s’éprouver, des heures à s’apprivoiser. Au final, la solitude glisse, se dissout, par habitude. Mais est-elle encore présente, en sourdine, tout autour.
Il y a l’anxiété des premiers jours, ceux qui nous mènent, par nouveauté et perte d’équilibre, à consulter pour se donner des benzodiazépines. Les premiers moments : assise dans un salon d’un petit appartement, seule, un 22 décembre, les voisins partis. Le noir, le silence, et les pensées qui tourbillonnent, trop vite. Le corps ne répond plus, il est dissocié. La peur que ça ne s’arrête pas. Il y a les premières années à survivre, et puis, il y a l’habitude. Les manies comblent la solitude : nettoyer, cuisiner, marcher, être en mouvement. La lecture est trop pesante, on s’y retrouve et donc, on s’y perd.
Comme des vagues, ces états à demi enracinés dans le réel, reviennent périodiquement. On s’évite, on s’enivre, on s’enfume, on avale des comprimés. On consulte, ça aide disent-ils. Ça rattache au monde.
On s’enfuit, on se noie, un peu, pas trop, on survie. On rencontre des âmes esseulées, existentiellement meurtries. On se voit, on se comprend, on s’appuie l’un sur l’autre le temps d’une histoire.
Merci pour ton témoignage. Non censuré. / Thank you for your shared experience. Uncensored.
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